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Attoungblan ou atoumblan

Ce tambour d'une autre conception, composé d'une caisse en forme de mortier à socle, mesure environ 100 à 150 cm de long. Cependant, certains ont la forme d'un cylindre particulièrement étroit et allongé reposant sur un socle (ceux de Sankadiokro, Amélékia, Zaranou, Niablé…)

Ils sont recouverts d’une peau de guib ou antilope harnaché wanzanin. La peau est tendue par des ficelles passant sous des tenons enfoncés dans la caisse. Afin de tendre la membrane, le musicien enfonce davantage les tenons à l’aide d’un maillet ou d’une pierre. Il trouve un usage semblable au grand tambour d’appel. Servant toujours couplé (mâle et femelle), à la transmission de messages, ces tambours imitent la voix humaine en livrant des textes figés, qui passent d’une génération à l’autre sans altération. Le tambourinaire peut faire « parler » l’attoungblan assis ou debout. Dans les deux positions, le « visage » du « couple » s’incline vers lui ou vers l’avant. Dans le dernier cas, il se tient debout entre les deux tambours ; le tambour mâle est à sa gauche et le tambour femelle à sa droite. Lors des grandes réunions publiques, funérailles, rassemblements politiques, défilés militaires, chaque nouvel arrivant est salué par la devise de son village ou de son aboussouan (lignage matrilinéaire). Lors de l’intronisation des chefs traditionnels, les joueurs d’attoungblan saluent les nouveaux arrivants de leur surnom nzabranwan tambouriné, qui leur répondent verbalement, et leur font un don. Un dialogue s’engage parfois entre eux, mi-parlé, mi-tambouriné.

Ici encore, les événements passés dont il est question ne sont pas explicitement racontés, le sens des allusions historiques n’est pas perçu par le commun des hommes, mais plutôt de tout individu instruit dans cette discipline au cours de son obligatoire préparation civique. Chez les Agni, les messages sont transmis en twi, langue des Ashanti, qui n’est compris que d’un petit nombre.

Le tambour mâle est celui qui a le ton bas et le tambour femelle, le ton haut. « C’est toujours le mâle qui a le dernier mot. C’est le mâle qui réveille la femelle, c’est le mâle qui spécifie le message. L’attoungblan est un instrument qui ne bouge pas et qu’on ne doit pas trop déplacer. Les Akan disent qu’il a l’hernie : aussi se déplace-t-il péniblement ».

Dans l’ensemble kinyankpli, c’est le maître-tambourinaire qui joue les attoungblan ; c’est lui qui dirige l’orchestre. Selon Niangoran-Bouah, le mâle émet un son grave parce que la paroi de la caisse de résonance est mince et la cavité intérieure plus grande. La femelle émet un son aigu parce que la paroi de la caisse est plus grande et la cavité intérieure moins importante. Selon le même auteur, le tambourinaire est tenu de donner tous les textes avant l’information pour laquelle il officie. Le corpus tambouriné des Akan peut-être divisé en deux parties principales.

Le préliminaire
Les appels et les évocations
– l’appel du tambour mâle au tambour femelle ; il le réveille afin d’être disponible pour son utilisation,
– évocation du nom des personnages primordiaux (concepteur, sculpteur, premier tambourinaire et nom des génies),
– évocation du nom de l’arbre servant à tailler le tambour et de la forêt qui renferme cette essence,
– évocation du nom de tous les éléments constitutifs du tambour,
– évocation du nom des animaux utiles à l’homme,
– évocation du nom des forces cosmiques,
– évocation du nom du tambourinaire de service.

Le message à tambouriner ou l’information à donner à l’ensemble de la population.
Les textes de l’attoungblan se présentent comme des dialogues entre le tambour mâle et le tambour femelle qui, pour la circonstance, jouent les rôles de différents personnages ou acteurs intéressés Niangoran-Bouah.
Chez les Akan, ce sont les principaux « tambours parleurs ». Chaque rythme tambouriné a une signification propre. Le musicien chargé d’émissions officielles obéit directement au roi ou au chef, et ne touche jamais le tambour de la main nue, mais à l’aide de baguettes fourchues.
Lors des événements à la cour royale ahinvié ce sont ces tambours qui annoncent l’arrivée du roi ou des chefs. Ils annoncent aussi l’arrivée des guerriers au lieu de rassemblement.

La devise tambourinée des Dihyè (princes de l’Indénié) est : bè ngou, bè ndom, « on ne les tue pas, on ne les vend pas ». à Yakassé-Féyassé et à Niablé, le répertoire de ces tambours consiste en sept messages ; à Bokakokoré, sept ou neuf.
Nous donnons ci-dessous les textes tambourinés que nous avons recueillis dans ces différentes localités.

Yakassé-Féyassé
1er texte : Mô ôbrou wôtra bè kloati yè wa tran blè
« Celui qui est plus rouge que le roi vient de s’asseoir. » Ce texte fait allusion à la grandeur du roi. Ce rythme tambouriné annonce l’arrivée du roi.

2e texte : Nahioua
Il annonce les décès. Autrefois, seuls le roi et les princes étaient autorisés à danser cette partie. Quiconque enfreignait cette prescription était passible de la peine de mort.

3e texte : Aproua bègan bènian
« Pas de dispute là ou le roi est assis. »

4e texte : Yâha batrangan n’goumin
« Il ne reste plus que les enfants sur terre » ; sous-entendu : tous les vieux sont morts.

5e texte : Essan n’goumin ôdjilan
« L’éssan (arbre) ne pousse pas seul » ; sous-entendu : sans l’aide des autres le roi ne peut rien faire, il n’est rien.
Les autres textes tambourinés s’adressaient aux femmes, aux hommes, aux princes et aux petits fils du roi.

Niablé
Tous les musiciens-instrumentistes étant d’origine ghanéenne, tous les textes tambourinés étaient en ashanti. Ne comprenant pas cette langue, nous n’avons donc pas pu recueillir littéralement l’intégralité des messages.
1er texte : Que le roi vienne danser.
2e texte : Que les femmes nobles viennent danser à leur tour.
3e texte : Invitation aux ancêtres du roi à venir boire de la boisson.

Bokakokoré
1er texte : Agouamane ou Agouamanin
Ce rythme glorifie les danseurs. Cette partie est ouverte à tout le monde.

2e texte : Yâha batrangan n’goumin
« Il ne reste plus que les enfants sur terre » ; sous-entendu : tous les vieux sont morts.

3e texte : Essan n’goumin ôdjilan
« L’éssan (arbre) ne pousse pas seul » ; sous-entendu : sans l’aide des autres le roi ne peut rien faire, il n’est rien.

4e texte : Yè fa modja tou goua
« C’est le sang que nous montrons, exhibons dehors » ; sous-entendu : c’est avec le sang qu’on badigeonne les sièges royaux lors de la fête d’igname.

5e texte : Watou n’gowa
C’est le moment ou l’heure de l’amusement.

6e texte : Boutou boutoussou, kata katassou
« Abaisse-toi pour pouvoir bien fermer » (notre propre traduction).

7e texte : Fa bié man patakou
« Si tu as à manger, donnes-en à l’hyène même si elle n’a pas une bonne renommée » (traduction du secrétaire de la cour royale).

8e texte : Min fâ kôkôré tchua abôtrin
Expression, qui selon le Secrétaire de la cour royale, serait en twi (langue ashanti du Ghana).

9e texte : Esson tia n’gassou wôn vanti
« Si l’éléphant marche sur un piège, ce piège ne se détend pas. » Allusion à l’adage selon lequel aucun vrai chef ne se laisse prendre au traquenard, mais déjoue toutes les embûches en écrasant sous ses pieds l’ennemi. Ce texte illustre la force, la puissance du roi que rien ne peut arrêter dans sa marche. Lors des cérémonies, les attoungblan sont toujours les derniers à être joués.

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