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Félix Houphouët-Boigny (18 Octobre 1905 – 7 Decembre 1993)

Les hommes comme les pays ont un destin auquel ils n'échappent point. Celui de Félix Houphouët-Boigny s'est conjugué avec le surgissement du mouvement anticolonialiste ivoirien et la naissance de la Côte d'Ivoire moderne.

Autant ces circonstances ont façonné sa puissante personnalité, autant il a su en extraire l’énergie potentielle pour imprimer sa marque aux événements. Du métier de médecin au combat du militant anticolonialiste, de l’homme d’Etat à l’apôtre de la paix, c’est le même itinéraire d’une longue carrière politique, fondée sur des convictions profondes et servie par une intelligence, une imagination et une énergie remarquables. Les chemins du destin et de la liberté ont été largement balisés et parcourus par celui qui s’était fixé pour idéal la quête de la vraie paix, nouveau Graal promis aux nations du monde et aux hommes de bonne volonté.

Félix Houphouët-Boigny est issu d’une famille traditionnelle baoulé. Formé selon les principes de l’éducation africaine traditionnelle, il suit cependant le cursus des écoles du gouvernement général de L’Afrique occidentale française (AOF).

Médecin africain, il exercera son métier pendant trois lustres avant de faire son entrée en politique.

On peut, à partir de trois angles de vues, appréhender l’homme tout court d’abord, l’homme politique ensuite, l’homme de foi enfin.

L’homme, par ses qualités, par sa formation, par sa philosophie de l’existence a préparé le politique à l’exercice des hautes responsabilités qui, elles-mêmes, trouvent leur accomplissement et leurs fins dans la transcendance.

La cohérence et la constance des convictions et des certitudes, des choix et des actes de Félix Houphouët-Boigny révèlent cette triple dimension d’un destin hors du commun.

L’homme ou les chemins du destin
Les origines

Dans nos sociétés traditionnelles qui ont organisé et minutieusement les relations humaines, tout Africain met un point d’honneur à connaître ses origines, à réciter sans hésitations et sans erreurs sa généalogie.
Or que n’a-t-on pas lu et entendu sur les origines de Félix Houphouët-Boigny, alors qu’il n’a jamais fait mystère de cette question, qu’il s’en est expliqué à plusieurs reprises et publiquement.

Les ancêtres
Les Baoulés, on le sait, sont issus de la fusion de groupes autochtones et d’émigrants akans partis de l’actuel Ghana dans la première moitié du XVIII e siècle. Ils occupent d’abord la région de Bouaké avant d’essaimer pour les nécessités de l’exploitation des mines d’or et du commerce, dans les régions de Yamoussoukro, Toumodi, Kocumbo et Tiassalé. C’est dans ce mouvement que l’éponyme N’dri Boigny s’installe autour des années 1850 à Kami, aujourd’hui un des quartiers suburbains de Yamoussoukro. C’est là qu’il fait souche en épousant la princesse Kokoblé. De leur union naîtront cinq enfants dont les descendants forment la famille élargie de Félix Houphouët et le noyau autochtone du village de Yamoussoukro.

Laissons la parole à Félix Houphouët lui-même :

« La fille née de ce mariage, a porté le nom d’Adjoua, belle-mère de Boigny. Elle a épousé le Chef Ahounou du village de Morofè et c’est de cette union que naîtront quatre filles qui perpétueront la lignée maternelle : Yamousso, Amoin, Adjo et Brou ».

Brou est la grand-mère de Félix Houphouët. Elle épouse Kimou, le chef de Diokro dont Félix Houphouët a revendiqué l’héritage dans une de ses interventions publiques (« vous pourrez tuer Houphouët-Boigny, mais vous ne tuerez pas l’héritier de Kimou ; mon grand-père était de son temps, l’un des plus riches de la région faafoué, déclarait-il le 26 avril 1983 »).

Les parents
Le couple Kimou a trois filles et un garçon. La troisième fille, Kimou N’dri, dite N’dri Kan épouse N’Dolly Houphouët du village de Gloyaokro, du sous-groupe Baoulé N’Zikpli ( sous-préfecture de Didiévi ). Ce sont les parents de Félix Houphouët qui est donc un Baoulé pur sang par son père N’Zikpli de Didiévi et par sa mère Akouè de Yamoussoukro.
N’Dolly Houphouët et N’dri Kan ont cinq enfants : trois filles (dont une décédera en bas âge) et deux garçons.

La généalogie de Félix Houphouët est donc connue. Elle privilégie la lignée maternelle parce que la société baoulé est une société matrilinéaire (le matriarcat comme on le dit improprement chez nous). La parenté, faut-il le rappeler, n’est pas seulement biologique, elle est aussi une convention sociale. Selon que la société est patrilinéaire ou matrilinéaire, tel ou tel groupe de parents est privilégié, reconnu.

Le cercle de famille

Félix Houphouët naît le 18 octobre 1905 à Yamoussoukro. Il reçoit comme prénom baoulé, Djaha (souvent contracté en Dia ) en hommage de reconnaissance à la divinité qui permet sa naissance et dont il serait une hypostase. Après sa conversion au christianisme en 1916, il prend le prénom chrétien de Félix. En 1946, il ajoute à son nom celui de son trisaïeul Boigny. Il s’en est expliqué dans le journal Clarté de Dakar (n°75 du 4 janvier 1946).

L’enfant révèle très vite quelques traits du futur homme. Il est plutôt entêté, n’hésitant pas à enfreindre le protocole pour jouer avec les enfants du village, ou les interdits alimentaires censés protéger la puissance mystique qu’il aurait reçue à sa naissance. Impérieux et fier comme son père, il est aussi sensible et généreux que sa mère.

Mais des évènements tragiques ont endeuillé ses premières années, créant cette habitude du malheur qui a trempé l’écorce du jeune enfant et préparé l’adulte à accueillir avec sérénité les fortunes et les infortunes de la vie d’homme. Le jeune Houphouët perdra successivement son père, son oncle Kouassi N’go assassiné en 1910, sa tante Yamousso et un peu plus tard, en 1935 et en 1938, sa mère et son frère cadet.

En plus de ces drames familiaux, quelques dates, quelques évènements liés au début de la colonisation française ont contribué à façonner l’héritier de Kimou.

L’année 1910 est celle du transfert du poste militaire français du village de Bô-nsin (orthographié de façon fautive Bonzi) à Yamoussoukro qui assurera la prééminence de ce village et de ses chefs dans la région Akoué. Yamousso est promue reine des Akoués et N’Gokro, nom originel de son village devient Yamoussoukro. En 1911, c’est la fin de la résistance héroïque des Baoulés à la conquête coloniale, résistance marquée par des actes de bravoure, de patriotisme qui préfigurent ceux de la lutte politique des années quarante et cinquante, mais aussi par la conciliation et la collaboration. Et plus tard, Félix Houphouët ne cessera pas de méditer sur l’exemple de sa tante Yamousso qui sut concilier la résistance de ses frères Akoué et la collaboration avec les Français. La conquête achevée, la résistance brisée, l’occupant français s’attellera à la « mise en valeur » du territoire. De nouvelles cultures végétales, tels le café et le cacao sont introduites. Progressivement quand l’hostilité des autochtones est surmontée, se développera une économie de plantation. Les Boigny qui avaient pratiqué auparavant l’orpaillage et le travail de la terre deviendront de grands et riches planteurs.

Héritier d’une lignée illustre et fils de son temps, Félix Houphouët est aussi à la tête d’une famille étendue dont il saura maintenir la cohésion et la solidarité. Le noyau du cercle familial est constitué par ses deux sœurs aînées, Faitai ( décédée en 1998 ) et Adjoua (décédée en 1986), son frère cadet Kplé Augustin (décédé en 1938), ses cousins Kouassi N’Go et Yao Simon (décédé en 1990) et ses deux cousines germaines Amoin (décédée en 1989) et Djénéba. Les autres parents sont les cousins descendants de N’Dri Boigny et de Kokoblé avec une prééminence des lignées utérines sur les lignées consanguines, selon les règles de parenté baoulé.

Au début des années trente, Félix Houphouët épouse Kady Sow, nièce du Roi des Agni de l’Indénié. Le couple aura cinq enfants dont quatre vivants. En 1952, Félix Houphouët épouse en secondes noces Brou Marie-Thérèse du village royal baoulé de Sakassou.

Laissons-là cette fausse querelle des origines. Remarquons seulement qu’une certaine gauche ivoirienne fait maintenant l’apologie du sang bleu, met à l’index les roturiers, en attendant peut-être de sacrer demain des rois et des reines !

Mais comme le dit avec humour le Président Houphouët, « on n’est pas allé chercher Lénine dans la famille des tsars ! »

La formation
Félix Houphouët est formé selon les principes de l’éducation africaine que reçoit tout jeune villageois. Cette éducation africaine enseigne le respect des anciens, la solidarité, la fraternité, le savoir-être.

Le futur président ivoirien suit cependant tout le cursus des écoles du gouvernement général de l’AOF.

L’Ecole de Bô-nsin et le Groupe scolaire central de Bingerville
Le jeune Houphouët effectue les cinq années de l’enseignement élémentaire. Il se révèle brillant potache en étant toujours premier de sa classe. Après l’obtention du certificat d’études, il est admis en 1915 au Groupe scolaire central de Bingerville (devenu par la suite Ecole primaire supérieure) où il effectue trois années d’études.

L’Ecole de William Ponty et l’Ecole de médecine
En 1918, Félix Houphouët réussit le concours d’entrée à l’Ecole normale William Ponty. Le jour de son embarquement pour le Sénégal, il se fait remarquer en dirigeant la protestation des élèves ivoiriens contre la différence de traitement entre eux (logés sous l’entrepont) et leurs condisciples venant du Dahomey (actuel Bénin). Il obtient gain de cause auprès du gouverneur à Bingerville. Le jeune élève fait montre déjà d’un courage tranquille et d’une certaine forme d’éloquence.

Après avoir passé avec succès trois années à William Ponty, Félix Houphouët achève avec brio sa spécialisation de médecine à l’Ecole de médecine de Dakar. Il sort major de sa promotion en 1925 (les résultats sont publiés dans le journal officiel de l’AOF de 1925). Pendant ses années d’études, il est, selon le témoignage de ses condisciples, caractérisé par son calme, sa boulimie de connaissances, son esprit de camaraderie. Il est également marqué par l’influence de trois de ses professeurs : Claude Raquain de sensibilité socialiste décide de son orientation à l’Ecole de médecine ; Lamine Gueye, le futur homme politique du Sénégal, lui enseigne les mathématiques et l’honore de son amitié ; le médecin-général Aristide Le Dantec lui apprend, selon ses propres termes, « par l’exemple, que vivre c’est se donner ».

Le séjour sénégalais permet à Félix Houphouët de découvrir et d’observer les manifestations de la vie politique coloniale. Les originaires des quatre communes du Sénégal (Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar) jouissent de la citoyenneté française et peuvent élire des représentants à l’Assemblée métropolitaine. Les réunions politiques, les campagnes de presse, les joutes oratoires auxquelles ces élections donnent lieu, sont une vivante leçon de choses pour le futur homme politique ivoirien.

Toutefois son entrée en politique ne se fera pas dès le retour au pays. C’est dans l’exercice de sa profession de médecin qui le mènera à la découverte de la Côte d’Ivoire profonde, qu’il passera de l’action médicale et sociale à l’action politique, de la blouse immaculée du praticien à la toge incandescente du tribun.

Le medecin
Revenu de Dakar le 21 novembre 1925 avec le diplôme de « médecin auxiliaire », titre officiel des médecins africains en AOF, Félix Houphouët exercera pendant trois lustres sa profession.

Privilège de major de promotion sans doute, il est affecté dans son propre pays – la pratique étant de faire servir les fonctionnaires à n’importe quel endroit de l’Afrique noire française – et qui plus est, dans la ville d’Abidjan, certes modeste bourgade en ces années vingt, mais mieux pourvue que les centres urbains de l’intérieur.

Abidjan et Guiglo : les débuts de la vie professionnelle
Félix Houphouët passe deux années à l’hôpital d’Abidjan de novembre 1925 à avril 1927. Ses supérieurs hiérarchiques nous ont laissé des témoignages élogieux de ses états de service. Ainsi Louis Bouffard, médecin principal des troupes coloniales et chef du Service de santé de la Côte d’Ivoire donne le 7 octobre 1926 l’appréciation suivante :

« Excellent collaborateur qui, depuis un an qu’il sert à Abidjan a fait preuve de belles qualités professionnelles et semble s’il persiste dans la tracée, être appelé à un bel avenir ».

Une année plus tard, le médecin major Henry, chef du Service de santé écrit :

« Le médecin auxiliaire de 3 e classe Houphouët possède de réelles qualités techniques et se tient d’une façon très digne ».

Lauréat de la Société médico-chirurgicale de l’Afrique de l’Ouest un mois à peine après sa prise de fonction, Félix Houphouët reçoit comme récompense cinq ouvrages de médecine qui lui sont remis avec solennité pour que « les médecins auxiliaires indigènes apprécient davantage la distinction accordée à leur camarade ». Les collègues du lauréat n’ont d’ailleurs pas attendu cette distinction pour lui manifester respect et estime. Le jeune médecin s’impose d’emblée par cette assurance et cette autorité que confèrent la compétence professionnelle et la considération de soi. Il mène une vie réglée et presque ascétique en s’interdisant certains plaisirs : la danse, l’alcool et le tabac. Il s’exerce ainsi à vaincre ses passions, à soumettre sa volonté. Somme toute, à être maître de soi pour pouvoir être, un jour, maître des autres.

Mais l’homme n’a rien d’un ermite replié sur son quant à soi. Au contraire, il organise réunions et soirées récréatives pour tisser des liens de franche camaraderie et de solidarité entre les cadres africains de l’hôpital central. Il va plus loin en mettant sur pied une Amicale des agents africains du service de santé d’Abidjan. Cet activisme, pourtant de bon aloi, est mal vu par ses supérieurs français qui déjà n’avaient pas apprécié ses velléités d’indépendance dont le refus de l’indemnité de première installation avait été une des manifestations. Le médecin major Henry que des problèmes privés avaient rendu particulièrement aigri et vindicatif, fait muter le jeune médecin à Guiglo, à l’Ouest de la colonie, dans une région encore sous administration militaire. C’est un autre Henry (simple homonyme du chef de santé d’Abidjan), capitaine de son état et commandant de cercle de Guiglo qui l’accueille le 27 avril 1927. A peine installé, le commandant l’invite à assister à une exécution capitale, invitation qu’il décline fermement. Félix Houphouët ne peut s’empêcher de penser qu’il joue non seulement de malchance mais aussi qu’il est en quelque sorte doublement puni. Ayant pris la mesure l’un de l’autre, les deux hommes s’engageront dans une collaboration confiante. Le capitaine Henry laissera les notes d’appréciation les plus élogieuses. En 1927, il écrit parlant d’Houphouët :

« Je crois devoir faire connaître les magnifiques résultats qu’il a obtenus tant au dispensaire que dans les tournées faites presque toujours en ma compagnie. Le nombre des consultations a quadruplé depuis son arrivée et le charlatanisme a tendance à disparaître dans le cercle.

(…) (II) a conquis la confiance de la plus grande partie de la population par ses soins de bienveillance et ses résultats ».

Et « ses résultats » concernent aussi bien la médecine curative que la médecine préventive, aussi bien les travaux d’assainissement que l’amélioration de l’habitat rural. En dépit de ses résultats, l’avancement administratif du jeune médecin est retardé, pour en remontrer à ce fonctionnaire pas comme les autres. La promotion viendra avec la mutation le 17 septembre 1929 à Abengourou dans l’Est du pays.

Abengourou : la prise de conscience politique
Dans cette région de l’Indénié, qui produit alors le tiers de la production ivoirienne de cacao, les intermédiaires du commerce de traite volent proprement les paysans. Et Félix Houphouët qui reste égal à lui-même dans le domaine professionnel, ne peut rester indifférent à cette grande détresse des paysans. En 1932, quand les prix du cacao baissent plus que de coutume, il quitte, selon son témoignage, sa blouse de médecin pour organiser avec les paysans une grève de la vente du cacao.

« Je ne pouvais, précise-t-il, rester indifférent, d’autant plus que la vie même du pays était en jeu et que j’étais intéressé à la vie des miens ». Houphouët publie, sous un pseudonyme dans le journal Le Trait d’union du 22 décembre 1932, un article au titre vengeur : « on nous a trop volés ». On peut y lire ces lignes :

« Nous nous sommes créés d’importantes plantations dont les produits doivent assurer notre bien-être. Pour justifier leurs spéculations, certaines personnes affirment cyniquement que nous avons peu de besoins à satisfaire. Si les conditions dans lesquelles nous vivions il y a vingt ans sont jugées satisfaisantes, la France n’aura pas de raison d’être dans cette colonie. Or si nous avons la paix, nous n’avons pas encore le bien-être. Nous avons des maisons à construire pour remplacer les taudis, nos femmes et nos enfants à habiller, à nourrir d’un aliment de plus en plus riche, nos enfants à élever. Nous n’avons d’autres ressources que le produit de nos plantations (…)

La légende entretenue par ceux qui en tirent profit veut que les indigènes sans exception soient menteurs. Nous ne serons pas les seuls à souffrir de cet état des choses (…)

Diminuer nos pouvoirs d’achat c’est porter également un grave préjudice au commerce. Or depuis dix ans, une bonne partie de nos revenus est détournée par les agents malhonnêtes qui fraternisent avec les traitants dont la plupart, vieux employés licenciés n’ont pour tout capital que l’amitié, la complaisance de leurs anciens camarades ».

L’identité véritable de l’auteur de cet article est vite découverte par l’administration. Et Houphouët doit aller s’en expliquer chez le gouverneur Joseph Bourgine qui assurait alors l’intérim de la colonie pendant l’absence du gouverneur titulaire, François Reste. Le gouverneur se montre fort compréhensif. Le médecin n’en est pas moins pénalisé. Selon la note de son chef de service en date du 14 octobre 1933, il est « proposable pour le grade supérieur, mais non proposé ». Et après un long congé de trois mois passé dans son village de Yamoussoukro, il reçoit, par décision du 3 février 1934, une nouvelle affectation à Dimbokro. Il aurait souhaité aller plus loin dans cette action de l’Indénié en jetant les bases d’un syndicat de planteurs, mais il n’est pas suivi. Comme on le sait, ce n’est que partie remise. Il récidivera en 1944…

Dimbokro et Toumodi : la fin de la carrière de médecin
A Dimbokro, Félix Houphouët fait l’unanimité sur sa valeur professionnelle. Un rapport du 6 septembre 1936 le décrit en ces termes :

« Sa puissance de travail est considérable. Le chiffre de ses consultations a crû dans des proportions énormes. Son dévouement à ses fonctions est inlassable, sa bourse toujours ouverte aux déshérités et aux nécessiteux ».

Le médecin s’occupe aussi de médecine sociale et d’éducation politique s’il faut en croire le témoignage de Mamadou Coulibaly.

Enfin Toumodi, subdivision administrative dont dépend le village de Yamoussoukro, est son dernier poste de médecin. Il y sert de 1936 à 1939. De là il fait des séjours plus fréquents dans son village pour visiter les siens et suivre l’évolution de ses plantations. Car le médecin est aussi planteur depuis 1925, année de création de sa caféière baptisée Guiglo en souvenir de son deuxième poste d’affectation. Le travail de la terre est, pour Félix Houphouët, un legs de sa famille paysanne, mais aussi un ancrage quasi mystique. Parce que la terre, selon J. Rabemananjara « constitue pour l’individu le point de jonction entre le passé, le présent et l’avenir : elle recèle donc en elle le secret comme les possibilités d’épanouissement de l’homme ».

Le travail de la terre permet enfin au jeune fonctionnaire de se créer des sources de revenus propres et substantielles qui font que l’administration coloniale n’aura pas barre sur lui, quand viendra le moment de l’action politique.

Dès 1938, son chef de service lui demande de « choisir entre le service de santé et la politique locale ». Le choix ne sera pas difficile à faire. La disparition du frère cadet, Augustin Houphouët, laissa vacante la chefferie de canton des Akoués.

Le chef de canton
Par arrêté n°1896 du 8 juin 1939 du gouverneur général de l’AOF Mondon : « M. Houphouët Félix, médecin auxiliaire de première classe est mis en service détaché dans la position de congé hors-cadre, en vue de sa nomination à la chefferie des Akoués (cercle de Dimbokro) ».

S’ouvre pour lui un nouveau champ d’expérience dans la connaissance et la conduite des hommes.

A la tête du canton des Akoués, Félix Houphouët bénéficie des atouts de la connaissance de la société traditionnelle africaine, grâce à son éducation africaine, ses diverses initiations et de l’ouverture au monde moderne par sa formation à l’école coloniale.

L’administrateur commandant le cercle de Dimbokro parle de lui dans un rapport de 1938 en ces termes :

« Houphouët avait du commandement et voulait améliorer les conditions de vie de ses administrés. Il en a assez de savoir qu’il est très riche, mais qu’il ne peut rien dépenser. Ses réserves d’or l’ennuient parce qu’elles dorment. Le cercle doit à Augustin Houphouët grâce à Félix Houphouët, un essai de modernisme – dans ce pays qui rappelle tant la féodalité – il lui doit un village moderne, à Yamoussoukro, sur le grand axe intercolonial – une belle maison – le château de famille ( 300 000 F environ) ; à côté : des villas – l’une d’elle est déjà construite. Plus loin, dans le fond, huit rangées de cases, hautes, larges, aérées – tout un urbanisme qu’on est heureux de découvrir. Il convient de préciser – pour l’avenir – que Félix Houphouët est médecin auxiliaire, il a dans le pays, un immense prestige, celui d’un grand nom, celui du gendre de Boa Kouassi, le roi de l’Indénié – celui aussi de sa propre famille, une des plus anciennes et des plus connues de la région. Il sera bientôt en disponibilité et veut exercer gratuitement pour l’amélioration de la santé de ses congénères ».

Ce rapport (consultable aux Archives nationales de Côte d’Ivoire) est, rappelons-le – de l’année 1938 !

Pendant ses six années de chefferie cantonale, Félix Houphouët s’emploie à améliorer le sort de ses compatriotes. Il diffuse les notions d’hygiène et de prophylaxie, concourt à l’amélioration de l’habitat. Il donne l’exemple par le développement de la productivité sur les plantations, par l’engagement de travailleurs volontaires et rémunérés.

Dans un rapport rédigé en 1945 par le gouverneur André Latrille, on y lit ces lignes :

« Félix Houphouët montra le plus grand zèle dans ses nouvelles fonctions. Par la seule persuasion, il améliora peu à peu l’hygiène des villages et les plantations indigènes. Possédant par héritage une solide fortune, il construisit à ses frais un dispensaire à Yamoussoukro. Son héritage paternel comprenait une importante plantation de caféiers et de cacaoyers. Il organisa scientifiquement cette plantation et, malgré des difficultés d’embauchage de volontaires, propres aux planteurs africains, il obtint un rendement de 500 kilos à l’hectare pour le cacao. Ces chiffres (qui ont été vérifiés par la mission d’inspection du travail) sont pour le café le rendement moyen d’une bonne plantation européenne ; ils sont pour le cacao supérieurs à tous les rendements des plantations européennes. Je répète que ces résultats ont été obtenus malgré une insuffisance de main-d’œuvre due aux obstacles apportés jusqu’à ces derniers temps à l’embauche des volontaires. Ils seront largement dépassés dans la prochaine année ! On peut donc dire que la plantation du chef de canton Félix Houphouët constitue une des entreprises pilotes préconisées par la conférence de Brazzaville. Il est particulièrement satisfaisant de constater que cette situation est l’œuvre d’un Africain entièrement formé par la civilisation française ».

Certes, en ces temps tourmentés où Félix Houphouët est pris entre le marteau de l’administration coloniale et l’enclume de la coutume africaine, la situation est loin d’être idyllique. Et le chef de canton devenu chef de parti aura l’honnêteté de reconnaître en 1950, devant la commission d’enquête parlementaire sur les évènements survenus en Côte d’Ivoire, que « l’exploitation des travailleurs n’intéressait pas les seuls métropolitains. Elle intéressait également des Africains autochtones dont moi-même ». Mais il saura aussi faire la part du feu et sauvegarder les intérêts essentiels de ses administrés.

De l’élève des écoles du gouvernement général, au médecin et au chef de canton, Félix Houphouët s’est formé, perfectionné humainement, intellectuellement, moralement pour assumer son destin. Et le grand destin, c’est toujours la rencontre d’un homme et de circonstances exceptionnelles qui sont ici la seconde guerre mondiale. Celle-ci bouleverse l’ordre du monde, pousse les peuples colonisés à regarder au-delà du jour et à lutter pour leur émancipation après avoir combattu pour la liberté des autres. Face aux pressions externes et internes, la France est amenée à faire des réformes.

La conférence de Brazzaville puis la constitution de la IVe République reconnaissent des droits politiques aux Africains, ouvrant ainsi des brèches dans la forteresse du colonialisme.

Le président du Syndicat Agricole Africain
Avec humour, Félix Houphouët aime à rappeler qu’il n’a jamais été candidat à un poste de la carrière des honneurs. Cette opinion est tout à fait juste pour son élection à la tête du Syndicat agricole africain qui marque le début de son ascension politique.

La création du Syndicat agricole africain
Au vrai, les grands planteurs anciennement établis et fortunés sont nombreux dans le pays. Certains ont participé depuis 1937 au Syndicat agricole de la Côte d’Ivoire qui rassemblait planteurs européens et planteurs africains. D’autres sont membres de la Chambre d’Agriculture ou de la Chambre de Commerce. On peut citer ainsi Gabriel Dadié et Joseph Anoma, planteurs à Agboville, Emile Boni à Daloa, Edouard Ello à Bouaflé, Fulgence Brou et Gustave Kadio à Aboisso, Lamine Touré à Grand-Bassam, Georges Kassi et Félix Houphouët à Yamoussoukro.

Pourquoi et comment de tous ces hommes, le dernier et le plus jeune fut distingué ? Sur le pourquoi, Félix Houphouët avance avec raison que sa double qualité de lettré et de fils de chef lui permet d’être accepté à la fois par la nouvelle élite et par l’élite traditionnelle. Sur le comment, Joseph Anoma, un des fondateurs du Syndicat a livré un témoignage éclairant :

« Nous avions tous les mêmes problèmes face aux planteurs blancs. Aussi, quand le Président Houphouët nous envoya à tous des messages, en particulier, par Georges Kassi pour une réunion à Abidjan, nous répondîmes tous à son appel. Et le 10 juillet 1944, nous nous retrouvâmes à Abidjan, à « l’Etoile du Sud » chez Georges Kassi. Comme je l’ai déjà dit, nous étions une poignée d’amis et nous nous connaissions tous. Et, c’est debout que nous écouterons l’exposé succinct du Président Houphouët et de Georges Kassi et que nous prendrons en quelques heures, les dispositions les plus urgentes de la création du Syndicat agricole africain. Houphouët proposait qu’on en dépose les statuts le jour même, pour prendre de vitesse les colons qui, depuis la conférence de Brazzaville, s’employaient à empêcher l’application des décisions humanitaires prises au bénéfice des indigènes. Nous étions peu nombreux à ce rendez-vous dont nous ne mesurions pas alors la portée historique : Georges Kassi, Lamine Touré, Djibril Diaby, Kouamé N’guessan, Dadié, Houphouët, Fulgence Brou et moi-même. Il fallait être au moins sept pour constituer un syndicat, donc nous étions en nombre suffisant. En vitesse, nous alignâmes les noms, approuvâmes les statuts, constituâmes le bureau. Nous choisîmes, à l’unanimité, le plus jeune et le plus dynamique d’entre nous comme président du syndicat : Félix Houphouët-Boigny qui avait alors quarante ans ».

L’action du Syndicat agricole africain
Du dynamisme et aussi de la pugnacité, il en faudra, au président du syndicat pour affronter les planteurs européens et faire triompher les idéaux des planteurs africains.

Qu’il suffise ici de rappeler quelques situations qui permettent de révéler des facettes de la personnalité complexe du président du syndicat. En attendant l’abolition du travail forcé, le syndicat, sur instructions de son président refuse l’adhésion de tout Africain ne possédant pas au moins deux hectares de caféiers ou trois hectares de cacaoyers en production et appelle ses adhérents au travail. Souci de vérité et mépris de la démagogie facile, exigence de travail et d’efficacité, autant de préceptes qui seront suivis avec constance par le chef syndicaliste et l’homme politique. Lors de la conférence sur la question de la suppression du travail forcé tenue en décembre 1944 à Abidjan et présidée par le Secrétaire général de l’AOF, le président du syndicat défend chiffres à l’appui les propositions des planteurs en faveur du travail libre et se révèle être un négociateur coriace. Quand les colons européens refusent de livrer le bois de chauffe, organisent la désertion des travailleurs des plantations pour démontrer l’inopportunité de la suppression du travail forcé, c’est encore Félix Houphouët qui mobilise ses compagnons pour relever le défi. En trois années de présidence de 1944 à 1947, il a non seulement implanté le syndicat dans le pays, mais en a fait le catalyseur de la révolte de tout un peuple contre le régime colonial. Il n’est guère étonnant que celui-ci fasse appel à lui quand il faut désigner des représentants aux assemblées métropolitaines. Et la plus belle victoire du président du syndicat sera l’abolition du travail forcé, instrument fondamental de l’exploitation coloniale, par la loi Houphouët-Boigny votée sans débat le 5 avril 1946 et promulguée le 11 avril.

Le président du PDCI
Le Syndicat agricole africain fut la matrice dans laquelle s’est formé le Parti Démocratique de la Côte d’Ivoire (PDCI). Il a fourni la masse de ses adhérents, ses ressources matérielles et financières, ses structures organisationnelles.

Mais le PDCI ne saurait être réduit à ce seul groupement et ses objectifs limités à la seule défense des intérêts corporatistes des planteurs. Au vrai, il a réalisé la fusion des revendications et des aspirations des diverses couches sociales ivoiriennes face à la colonisation et à ses excès.

Félix Houphouët fut le fédérateur des patriotes ivoiriens et des démocrates non ivoiriens (africains, français, levantins, etc.) dans un parti authentiquement africain et anticolonialiste.

Un parti démocratique
Dès l’origine, le PDCI est, en effet, ouvert à toutes les races, à toutes les classes, à toutes les nationalités. Et certains qui prônent aujourd’hui un nationalisme étroit devraient savoir que cela ne correspond pas à notre tradition, à notre histoire politique, non plus qu’à la situation de notre pays, pays-carrefour, pays de rencontres destiné à être la cheville ouvrière de la nécessaire et inéluctable fédération africaine.

D’aucuns ont prétendu que le parti créé le 9 avril 1946 n’en était pas un, qu’il n’avait pas de programme, et que et que…

Si le parti se définit, selon les politologues, par une organisation durable et complète, par une volonté délibérée d’exercer directement le pouvoir, seul ou avec d’autres (le PDCI le revendiquera avec les communistes en 1946, l’exercera avec les socialistes en 1956, enfin seul en 1960), par la volonté de rechercher un soutien populaire, alors le PDCI fut le seul véritable parti africain de la Côte d’Ivoire coloniale.

Nous pourrions parler des autres « partis » africains (le Parti progressiste, le Parti socialiste, le Bloc démocratique éburnéen, l’Entente des Indépendants, etc.) qui comptèrent si peu – et pour cause ! – dans notre vie politique. Il est significatif de noter que, de tous les nombreux partis politiques éclos depuis le 30 avril 1990, aucun ne revendique l’héritage de leurs prédécesseurs. Tous sont orphelins parce qu’ils n’ont même pas un héritage sous bénéfice d’inventaire ! Epigones de la lutte pour la liberté, ils s’acharnent à nier le combat pour la liberté du PDCI, veulent jouer les Fouquier Tinville et les Robespierre, en falsifiant l’histoire et en insultant notre mémoire collective.
Le programme

Quant au programme, l’article 5 des premiers statuts du PDCI élaborés en 1946 précise :

« Le Parti démocratique a pour mission de grouper les hommes et les femmes d’origine européenne et africaine luttant pour l’union des autochtones de la Côte d’Ivoire avec le peuple français, pour le progrès politique, économique et social des populations de ce pays suivant un programme de revendications démocratiques ».

Ce programme sera enrichi, élargi par celui du RDA dont le PDCI devient une section après octobre 1946. Félix Houphouët par le PDCI a donné une base politique à son action qui était au départ syndicale. Il a unifié dans une même contestation du pouvoir colonial les masses rurales représentées par le Syndicat agricole africain et les masses urbaines regroupées au sein d’associations d’originaires, de comités d’études politico-culturels et de syndicats (UOCOCI, CEFA, syndicats CGT). C’est cette situation qui explique la juste part qui revient au PDCI dans la naissance du Rassemblement Démocratique Africain (RDA).

Le président du RDA
Au congrès constitutif de Bamako, les Ivoiriens arrivent avec un parti de masse, le PDCI déjà constitué, un programme concis et précis, des hommes de qualité qui savent faire prévaloir l’intérêt de l’Afrique tout en ouvrant l’avenir. Félix Houphouët est de ceux-là. Et c’est donc logiquement qu’il est élu, à l’unanimité, président du Comité de coordination du Rassemblement Démocratique Africain ; qu’un autre Ivoirien, Fily Sissoko est élu secrétaire général et que le siège est fixé à Abidjan.

Nous ne reprendrons pas la saga du RDA qui est connue. Nous discuterons de trois questions qui suscitent encore des polémiques passionnées : le programme du RDA et la question de l’indépendance, l’alliance avec les communistes et le désapparentement, le problème de la balkanisation.

Le Programme du RDA et la question de l’indépendance
A Bamako (du 18 au 21 octobre 1946), les débats les plus passionnés ont porté sur l’orientation politique à donner au mouvement. Fallait-il se prononcer pour l’indépendance comme objectif immédiat (à vrai dire très peu de délégués y pensaient, une telle revendication eût été irréaliste). N’oublions pas qu’à cette époque, même le Viet Nam de Ho Chi Minh, proclamé indépendant, faisait partie de la fédération indochinoise et de l’Union française et que le Mouvement démocratique de la Rénovation malgache réclamait l’indépendance malgache dans le cadre de l’Union française. Malgré cette modération, les Malgaches ont subi en 1947 la terrible répression que l’on sait. En outre le PCF, allié du RDA, n’était pas non plus pour l’indépendance. Le sens politique, le sens de la responsabilité commandaient de trouver un moyen terme, une formule qui préserve l’indépendance comme objectif à long terme tout en acceptant l’Union française. C’est ce point de vue que Félix Houphouët Boigny fit triompher. Et la résolution de politique générale définit clairement le but du mouvement :

« L’émancipation des pays africains du joug colonial par l’affirmation de leur personnalité politique, économique, sociale et culturelle, et l’adhésion librement consentie à une union de nations et de peuples fondée sur l’égalité des droits et des devoirs ».

Si le mot indépendance n’apparaît pas, le contenu y est. Car affirmer sa personnalité politique, économique, sociale et culturelle équivaut logiquement à une revendication d’indépendance. De même on ne saurait s’unir librement si l’on n’est pas d’abord indépendant. Enfin organiser les masses en vue de recouvrer cette liberté, c’était aller à l’indépendance.

A trop vouloir nier le rôle d’Houphouët- Boigny et de ses camarades de lutte, on arrive à nier le mouvement anticolonialiste africain lui-même, organisé et animé par le RDA.

Car c’est à partir de 1946 que s’organise la marche inexorable vers l’indépendance. Et ce ne sont pas les ouvriers de la 11 e heure, les communistes et cryptocommunistes du PRA (Parti du Regroupement Africain) et autres syndicats ouvriers ou estudiantins qui vont amener l’indépendance comme on essaie de le faire croire.

Et le programme du RDA proposait des mesures hardies, des objectifs concrets et précis. Ainsi, en matière économique : la restitution aux collectivités locales des domaines concédés et abandonnés, la liberté du commerce, la réforme fiscale, la nationalisation des banques, la création de coopératives et d’instituts de recherche agricole. Ainsi, en matière sociale : le développement de l’enseignement, la gratuité des soins médicaux, l’extension immédiate et effective des lois sociales, la liberté d’organisation des syndicats, la suppression du travail forcé, le paiement des assurances sociales et des allocations familiales.

Le désapparentement
La question de l’alliance entre le Parti communiste français et le RDA est obscurcie par les jugements passionnels, les témoignages partiels et partiaux. Il faut poser la question sous son vrai jour pour avoir des réponses adéquates.

Quelle fut la nature exacte des liens entre le PCF et le RDA ? Ces liens furent- ils déterminants dans l’action du RDA ?

La rupture de ces liens par le désapparentement a-t-elle infléchi, de quelque façon, le cours de l’évolution politique de l’Afrique noire ?

Telles sont, à mon sens, les questions dignes d’intérêt. Savoir si Houphouët-Boigny, d’Arbousier ou tel autre furent communistes ou pas est un point de détail. A supposer qu’ils le fussent (ce qui n’est, au demeurant, pas le cas) faut-il rappeler que le RDA est un mouvement d’union de tous les Africains quelles que soient leurs conceptions idéologiques ou religieuses, leurs origines, leurs conditions sociales.

Essayons donc de répondre aux questions énumérées ci- dessus.

Les liens entre le RDA et le PCF furent d’abord parlementaires. Les élus du RDA ne pouvant du fait de leur petit nombre former un groupe parlementaire, reçurent mandat de s’apparenter aux groupes communistes pour l’efficacité de leur action parlementaire.

En Afrique même les Groupes d’études communistes (GEC) contribuèrent à la formation politique des militants et des dirigeants du RDA. Mais il n’y avait pas de lien organique entre RDA et GEC, non plus qu’avec les syndicats d’obédience CGT qui soutinrent la lutte du RDA.

L’alliance avec le PCF et les forces démocratiques françaises a servi l’action parlementaire des élus du RDA et, dans une moindre mesure, la pratique anticolonialiste en Afrique même où des militants communistes français payèrent de leur personne pour défendre les justes revendications des colonisés. Ce fut le cas d’un G. Cauche, d’un Suret-Canale au Sénégal, d’un Franceshi, d’un Casanova en Côte d’Ivoire, d’un Morlet, d’un Fayette au Soudan.

Mais les objectifs des alliés restèrent différents. Le RDA refusait la lutte des classes et se voulait une vaste coalition anticolonialiste regroupant toutes les classes. Le PCF, parti marxiste et français, luttait pour la révolution sociale en France (du moins théoriquement) mais ne prônait nullement l’indépendance des peuples colonisés. Il combattit même les nationalistes indochinois et algériens, du moins dans les premiers moments de leur lutte.

Il y avait donc une opposition fondamentale des deux formations dans leurs options, leur démarche, leurs fins. Une telle opposition ne pouvait conduire qu’à la rupture.

En 1950, le RDA, notamment sa section ivoirienne, subit une répression sévère sans espérer un secours efficace de ses alliés communistes. Lors de leur XIXe congrès tenu à Gennevilliers, ceux-ci ne formulèrent pas de perspectives claires quant à leur prise de pouvoir en France ; quant à l’avenir des colonies africaines.

Menacé de paralysie dans son action par la pression conjuguée de la répression coloniale, de la division des élus africains, et de la pratique des communistes, le RDA choisit de rompre avec ses alliés.

Le désapparentement est annoncé officiellement le 19 octobre 1950.

On a voulu établir, non par démonstration rigoureuse mais par pétition de principe, un lien entre la rupture entre le RDA et PCF et l’évolution vers la soi- disant indépendance octroyée et le « néocolonialisme ».

Nous avons déjà indiqué que le PCF n’a pas prôné l’indépendance et que l’anticolonialisme fut le fait des masses africaines organisées et encadrées par le RDA. Et le désapparentement n’a nullement empêché une évolution radicale de certaines sections du RDA et le choix de la voie socialiste après l’indépendance, comme en Guinée et au Mali. Si donc, on ne peut expliquer le cours politique après 1950 par le désapparentement, c’est qu’il ne fut pas un évènement déterminant.

La fameuse querelle qui opposa en 1950-1952 Gabriel d’Arboussier à Félix Houphouët sur le désapparentement, par-delà les outrances de la polémique, ne révèle aucune divergence, quant au fond, sur la rupture avec le parti communiste et la question de l’autonomie (entendons l’indépendance) dont on voudrait faire la pierre de touche de l’anticolonialisme du RDA. Mais il y a plus et c’est peut-être le fin mot de la querelle. Ni Gabriel d’Arboussier ni les militants exclus du mouvement après la réunion du Comité de coordination du RDA à Conakry en 1995, quoi qu’ils en aient et quoi qu’ils en disent, ne réussissent à créer un deuxième RDA « pur et dur ». Et d’Arboussier réintègre en 1957 les instances dirigeantes du RDA.

En définitive, c’est la conjonction de la lutte des colonisés, des changements métropolitains (changements économiques, nouveaux gouvernants, etc.) et de la situation internationale qui explique la décolonisation de l’Afrique noire. A côté de ces grandes catégories de causes, le désapparentement n’est qu’une péripétie qui ne mérite ni cet excès d’honneur (avec le rôle surévalué du PCF) ni cet excès d’indignité (avec la disqualification des dirigeants du RDA qui surent prendre cette courageuse décision). Avec le recul de l’histoire, on découvre le vrai visage du PCF et la justesse de la décision d’hommes comme Houphouët ou comme Aimé Césaire (qui fut avec Léon Gontran Damas compagnon de route du RDA) qui rompit avec le PCF en 1956.

La balkanisation
Par une fausse assimilation avec la situation qui prévalut dans les Balkans, on a usé et abusé du terme de balkanisation en Afrique noire.

En fait, les partisans d’une confédération avec le maintien des « fédérations primaires » de l’AOF et de l’AEF et les partisans d’une fédération avec le rattachement direct des territoires à la France se situaient dans la logique du colonisateur. Or les fameuses fédérations de l’AOF et de l’AEF étaient conçues en fonction et pour les besoins de la seule métropole coloniale. Elles n’étaient donc pas fondées sur des bases saines, solides qui leur eussent permis de perdurer. Aucune autre fédération coloniale d’ailleurs ! Ni le Ruanda-Urundi belge, ni l’Afrique orientale britannique, ni les Rhodésies-Nyasaland. Et les deux exceptions de l’Union sud-africaine (aujourd’hui République sud-africaine) et du Nigeria se sont maintenues, mais à quel prix ! Ici une terrible guerre civile et une instabilité politique chronique, là un régime inhumain, l’apartheid et sa violence endémique.

Mais surtout les évènements des années 1957-1960 ont permis d’apprécier le degré de conviction des soi-disant contempteurs de la balkanisation.

Ceux qui n’avaient que le mot de fédéralisme à la bouche, ont sacrifié allègrement les tentatives de regroupement – de l’éphémère fédération du Mali au projet mort-né de République centrafricaine – dès qu’ils risquaient d’être les seconds à Rome et non les premiers.

Ce n’est pas Houphouët, président du RDA qui eut été plébiscité comme en 1946 qui pouvait avoir ces craintes. Il fut et reste un rassembleur et non un balkanisateur.

La colonisation qui divisa pour régner, n’avait pas préparé les voies de l’unité africaine. Et s’il n’y a pas de fatalisme historique, il y a, par contre, une logique des processus qui est plus forte que la volonté des hommes. Il était donc irréaliste de vouloir construire immédiatement de grands ensembles régionaux et à fortiori continentaux. C’était mettre la charrue avant les bœufs et courir à l’échec comme les quelques tentatives de regroupement l’ont suffisamment prouvé.

Mais depuis que nous avons repris notre initiative historique et que nous imprimons progressivement une autre logique à notre histoire, on ne peut accuser Félix Houphouët-Boigny et son pays d’être les fossoyeurs de l’unité africaine.

Le projet de double nationalité fut une ébauche de fédération des pays du Conseil de l’Entente. La Côte d’Ivoire a accueilli continûment des millions d’étrangers africains en leur accordant les mêmes droits qu’à ses nationaux (y compris le droit de vote jusqu’en 1995). Malgré ses maigres ressources, elle pratique une solidarité vraie en versant subsides aux gouvernants et subventions aux Etats africains frères. Elle est la cheville ouvrière de toutes les organisations régionales africaines créées depuis 1960. C’est à l’honneur d’Houphouët et de son pays de préparer par des actes la construction de l’unité africaine au lieu de la célébrer verbalement.

La lutte anticolonialiste a révélé un leader authentique, expression de son peuple et non créature du colonialisme. Un leader et non un deus ex machina , un primus inter pares d’un mouvement démocratique. Et s’il avait manqué à son devoir, « trahi » comme certains l’insinuent, le RDA qui n’était pas un parti stalinien mais un mouvement démocratique, en eût tiré toutes les conséquences. Si Houphouët-Boigny sut donc conduire à la victoire ce mouvement en dépit des heurs et des malheurs, s’il sut garder la confiance de ses pairs et des masses, c’est qu’il est effectivement un de ces grands hommes de l’histoire qui, selon Hegel, sont « ceux qui, dans leur temps, ont le plus de lucidité et savent le mieux ce qu’il faut faire ».

L’homme d’Etat
L’expérience de la vie parlementaire et ministérielle en France a préparé Félix Houphouët-Boigny à l’exercice du pouvoir. Député de la Côte d’Ivoire de 1946 à 1956, il est également ministre dans six gouvernements de la République française. Ministre non pour inaugurer des chrysanthèmes comme le disent certains persifleurs mais pour défendre l’intérêt de l’Afrique et apprendre le métier d’homme d’Etat.

Les qualités de l’homme d’Etat
Sur ces qualités, je me bornerai à deux appréciations.

La première est celle d’un opposant ivoirien, Marcel Anoma alias Amondji. Parlant du président ivoirien, il souligne « son intelligence extraordinaire des situations politiques et même du sens de l’histoire », et « son savoir-faire légendaire ».

La deuxième appréciation est du général de Gaulle qui, on le sait, était avare de compliments et qui savait écrire. On lit dans ses Mémoires d’espoir ces lignes sur Félix Houphouët :

« Cerveau politique de premier ordre, de plain-pied avec toutes les questions qui concernent non seulement son pays, mais aussi l’Afrique et le monde entier, ayant chez lui une autorité exceptionnelle et, au-dehors une indiscutable influence, et les employant à servir la cause de la raison ».

L’œuvre politique du Président ivoirien confirme ces appréciations élogieuses. Quelques résultats de la politique intérieure et de la politique extérieure montre cette réussite politique.

La politique intérieure
En ce premier lieu, mentionnons la construction d’une Nation ivoirienne avec un appareil administratif, des institutions qui ont permis de maintenir la légalité républicaine et d’assurer les évolutions et les changements inévitables jusque et y compris les plus récents (tel le multipartisme). Félix Houphouët a su préserver la stabilité politique et la paix sociale en dépit de secousses graves comme la crise politique de 1963 et les tentatives de sécession du Sanwi et du Guébié. Et on doit à « son savoir- faire légendaire », pour parler comme Amondji, d’avoir évité le pire. Tout comme en 1990 le retour au multipartisme qui s’est soldé partout en Afrique, sauf en Côte d’Ivoire, par des massacres inutiles. Il y a une nation ivoirienne bâtie par un homme et son peuple qui avait déjà pris conscience de lui-même par la lutte anticolonialiste du PDCI-RDA.

Et cet acquis n’est pas mince quand on sait que des Etats africains en sont encore au degré zéro d’organisation. Certes, comparaison n’est pas raison, mais comparaison permet de raison garder. Et surtout, il faut comparer les choses comparables, en l’espèce, comparer la Côte d’Ivoire aux pays africains qui ont connu une commune colonisation et accédé à l’indépendance en 1960. Et notre pays soutient avantageusement la comparaison !

En deuxième lieu, il faut citer le projet de société libérale, tempéré par nos traditions africaines. On s’est gaussé, aux temps triomphants des socialismes tropicaux, version « scientifique » ou « africaine », de cette singularité ivoirienne. On a parlé d’anticommuniste primaire. Voyez ce qu’il en est aujourd’hui des procommunistes secondaires et supérieurs ! L’option libérale a permis la relative prospérité ivoirienne et jeté les bases d’un développement véritable.

En troisième lieu, la formation des hommes, le capital le plus précieux. Les difficultés actuelles de notre système d’éducation ne doivent pas occulter les résultats de cette politique volontariste et réussie de formation tous azimuts des hommes qui nous donne aujourd’hui les moyens de sortir définitivement du colonialisme en brisant fil à fil les derniers liens de notre dépendance.

Enfin, la postérité retiendra que Félix Houphouët-Boigny, comme tous les grands hommes d’Etat fut un bâtisseur. Bâtisseur de lieux de mémoire de notre République (palais nationaux, monuments), d’édifices culturels et religieux, d’une remarquable infrastructure de communication, bâtisseur de Yamoussoukro, son chant du cygne.

La politique extérieure
Dans le cadre du système international dominé par les grandes puissances, la Côte d’Ivoire joue avec habileté de l’étroite marge de manœuvre laissée aux petites nations en voie de développement. Elle a élaboré une politique extérieure propre pour préserver ses intérêts diplomatiques et soutenir ses ambitions de leadership en Afrique de l’Ouest.

La diplomatie ivoirienne préconise la pratique du dialogue dans toutes les instances internationales. Elle joue un rôle actif dans la recherche négociée des conflits africains. Et le président ivoirien, principal inspirateur et acteur de cette diplomatie, est le médiateur et conciliateur reconnu en Afrique et hors du continent. Le voyage à Yamoussoukro d’hommes politiques de toutes tendances, les conférences et réunions « au sommet » qui se tenaient continûment dans la capitale ivoirienne, témoignent de ce rôle important dans l’équilibre diplomatique africain.

Enfin la conception houphouétiste de l’unité africaine a prévalu. Cette unité doit être progressive (des ensembles sous-régionaux, CEAO, régionaux, CEDEAO, UDEAC enfin continentaux, OUA, aujourd’hui UA), respectueuse des souverainetés nationales, soucieuse de réalisations concrètes plus que de constructions politiques supranationales précipitées. Cette conception a prévalu sur l’échiquier diplomatique africain, parce qu’elle correspondait aux faits (par exemple l’affirmation des Etats-nations, l’impossibilité de créer un seul Etat continental) et qu’elle a bénéficié d’un soutien actif de la Côte d’Ivoire et de son président.

La foi et les oeuvres
Pour Félix Houphouët-Boigny, l’action politique et l ‘acte de foi ne font qu’un. En d’autres termes, l’action politique ne trouve une dimension régulatrice que par référence à des valeurs absolues. Bingerville fut son chemin de Damas. Il y reçut du Révérend Père Gorju le baptême chrétien. Depuis lors, il vécut sa foi chrétienne en plénitude et en vérité. On sait le serment qu’il fit de ne jamais verser le sang humain en conformité avec l’un des dix commandements : tu ne tueras point. La foi, c’est aussi les œuvres de charité du président ivoirien en Côte d’ Ivoire et à l’extérieur. On connaît surtout les mosquées, les temples, les cathédrales et basilique qu’il a bâtis. Ces maisons de Dieu, traits d’union entre ciel et terre, ont contribué imperceptiblement mais inexorablement au maintien de la paix dans notre pays. Comme jadis les églises et cathédrales du Moyen Age occidental transformèrent une époque caractérisée par la rudesse des mœurs et le fracas des armes. Un peu comme notre Afrique actuelle qui a un besoin impérieux de paix.

L’apotre de la paix
La paix est le leitmotiv de l’action politique de Félix Houphouët-Boigny. Dans un de ses discours, il affirme :

« De nos jours, plus sans doute qu’au cours des époques successives qu’a traversées l’humanité, la paix mondiale est indivisible. La prospérité mondiale l’est aussi, et la paix et la prospérité du monde sont également confondues.

Que les troubles ou guerre s’installent en une partie quelconque du globe ne peut plus, à l’heure actuelle, nous laisser indifférents. La civilisation contemporaine est celle de l’universel et les souffrances de tels ou tels hommes et de tel ou tel peuple sont nôtres, désormais, elles sont aussi, susceptibles de devenir pleinement si, faute d’avoir su, à temps, éteindre l’incendie, l’humanité constate trop tardivement qu’elle n’a même plus les moyens de le limiter.

La prospérité mondiale, elle aussi, est indivisible. Chacun le sait ; mais chacun n’agit pas toujours comme s’il le savait. La prospérité de nos jours, est le lot d’un petit nombre de Nations ; c’est l’objectif probablement accessible de celles qui, grâce à elles-mêmes et à leurs amis, ont rassemblé les facteurs multiples du développement. C’est enfin, pour trop de peuples un grand espoir, mais un espoir incertain…

Cet état de choses contredit la justice et la morale les plus élémentaires ; il compromet les chances d’une grande partie de l’humanité d’accéder, dans des délais raisonnables, à une liberté autre que formelle ; il est et sera de plus en plus un frein à l’accroissement de la prospérité des pays riches, qui se privent de débouchés considérables.

Mais, surtout, le maintien de la paix mondiale ne peut se concilier longtemps avec cette situation, la misère et l’ignorance, le désespoir ou la désillusion sont les supports privilégiés des aventures et de la guerre, et ce n’est que dans le progrès rapide, harmonieux et continu du niveau de vie des peuples économiquement attardés que le monde doit placer l’espoir d’une paix mondiale réellement assurée, parce que fondée sur une justice aussi parfaite que possible et sur une liberté véritable ».

Dans sa pensée, la paix n’est pas seulement le contraire de la guerre. Elle est plus positivement équilibre intérieur de l’homme, équilibre intérieur de chaque nation, équilibre entre les nations. Elle doit donc se mener simultanément aux niveaux international, national et individuel. Elle est liée aux valeurs de justice, de démocratie, de tolérance, aux droits de la personne humaine et aux droits des peuples. « La paix, ce n’est pas un mot, mais un comportement » .

En d’autres termes, la paix ne peut être effective sans une transformation des attitudes, des valeurs, des conduites tant individuelles que collectives. Et seul un comportement de paix permettra de résoudre les conflits de notre monde, autrement que par les moyens de l’agressivité et de la violence.

La quête de la paix de Félix Houphouët est marquée par trois signatures : la basilique Notre Dame de la Paix , le prix international Félix Houphouët-Boigny pour la paix décerné par l’UNESCO, la fondation Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix.

En appelant son peuple à cultiver la paix, à dépasser les contingences matérielles, à ne pas prendre les moyens pour les fins, l’Homme d’Etat ivoirien remplit pleinement son rôle d’élu (au sens religieux) qui opère ici et maintenant, mais déjà d’une certaine façon sur un plan supérieur. Plan où se dissipent les ombres de la caverne de nos affrontements d’individus, de groupes et de nations.

Un auteur ivoirien, M. Amondji qui a écrit une biographie iconoclaste de Félix Houphouët-Boigny, lance, dès les premières lignes de son livre, ce cri du cœur :

« Il ne faut pas avoir peur des mots. Pour un Ivoirien de ma génération, il n’y a pas de honte à dire qu’entre 1945 et 1950, on a pris pour idole l’homme vers qui toutes les femmes et tous les hommes de notre pays, et pas seulement eux, regardaient alors.

Aussi loin qu’il soit possible de remonter dans le souvenir, entre tous les Ivoiriens de mon âge que je côtoyais, il m’apparaît vraisemblable que ma dévotion était l’une des plus fortes ».

Je dirais, pour ma part, paraphrasant la formule déjà employée par un autre grand homme : « Tout Ivoirien a été, est ou sera Houphouétiste ». Il en est ainsi parce que le destin de Félix Houphouët-Boigny symbolise pour son pays, en son temps, la liberté. Et le Sage de l’Afrique nous exhorte quotidiennement à ce combat pour la liberté dans l’union et la fraternité, par-delà nos différences politiques, nos petites querelles, nos calculs afin de bâtir pour notre pays un avenir de liberté et de prospérité car c’est là son destin !

SOURCE: Jean-Noël LOUCOU, Félix Houphouët-Boigny, Un Destin , Fraternité-Matin , N° 8 410, Samedi 17 Dimanche 18 Octobre 1992, Pp. 7-15.

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